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  • Photo du rédacteurDr Julien Drouart

Musée de la Vie quotidienne en RDA : la société du manque ?

Dernière mise à jour : 31 oct. 2023


Musée de la Vie quotidienne en RDA : la société du manque ?

Le Musée de la Vie quotidienne en RDA se situe au cœur d'un ensemble magnifiquement réhabilité. En raison de sa grande qualité, il mérite toute votre attention.


Une visite au Musée de la Vie quotidienne en RDA est incontournable


À l'époque de la division allemande, Berlin-Est était à la fois le centre administratif et culturel de la République démocratique allemande. La ville était la vitrine d'un socialisme qu'on voulait moderne et triomphant. En tout cas, il s'agissait de montrer la supériorité de l'économie collectivisée et planifiée sur le modèle capitaliste.


Après la Seconde Guerre Mondiale, la ville était un vaste terrain d'expérimentation architecturale. Les nouveaux ensembles suivaient les codes du réalisme avant de privilégier le préfabriqué, moins cher, plus rapide à construire et surtout de bien meilleure qualité. Le fonctionnalisme était mis sur un piédestal, généralement au détriment de la beauté formelle. Cependant, ces bâtiments proposaient aux populations travailleuses un confort de vie jusqu'alors inégalé. La seule condition : l'accès à ces logements reposait sur le mérite et la docilité des candidats.


Les réfractaires au régime et les individus jugés peu fiables étaient logés dans les derniers quartiers vétustes de la ville. C'est dans ces espaces délabrés que les cercles d'opposition s'organisèrent. À Prenzlauer-Berg, on voyait alors l'émergence d'une société parallèle avec des codes vestimentaires, culturels et sociaux différents de ceux glorifiés par le parti au pouvoir. Après la Réunification, ce fut l'un des premiers quartiers à bénéficier de travaux d'assainissement. C'est ainsi qu'en 2013, le Musée de la Vie quotidienne en RDA ouvrit ses portes.


Un cheminement intelligent


Au Musée de la Vie quotidienne en RDA, une exposition permanente est répartie sur plusieurs étages d'un espace relativement grand. Chaque pièce regorge d'objets, de photographies et d'affiches de l'époque. De plus, il est beaucoup question de supports audio et télévisuels. Il en ressort une muséographie colorée et dynamique.


Les thématiques abordées ne sortent pas des sentiers battus. Elles reproduisent les schémas narratifs déjà éprouvés dans ce genre d'expositions. Le régime SED en Allemagne de l'Est est présenté comme illégitime, assujetti à l'Union soviétique, œuvrant contre la volonté du peuple et faisant preuve d'une incompétence notoire.


Bien que nécessaire, le rappel historique occupe une place disproportionnée et surtout oriente la perception du reste de l'exposition. Les thématiques de la vie en collectivité (culture, éducation, logement, consommation) évoquent moins les individus que l'omniprésence du régime SED au quotidien. Par exemple, les rapports intimes sont perçus d'abord comme des espaces de liberté créés ou retrouvés.


En définitive, l'excès de politique dans l'exposition crée une certaine lourdeur. Ce sentiment désagréable contraste avec le dynamisme de l'exposition. La vie quotidienne en RDA était effectivement orientée et asphyxiée par un régime voulant tout contrôler. À ce titre, une visite complémentaire au remarquable Mémorial de la Prison de la Stasi permet de comprendre les rouages de la répression politique.


Un musée d'histoire allemande


La vie quotidienne dans une société fermée peut être évoquée en couleurs, sans que la gravité du sujet ne s'en trouve édulcorée. À ce titre, la muséographie est excellente car elle invite à repenser la RDA sous un angle très intéressant.


La question est-allemande est actualisée pour s'inscrire dans une perspective plus globale : l'affirmation d'une identité nationale commune. Le musée est une contribution au travail de réconciliation nationale. Le but est de parvenir à harmoniser le passé et rendre les rapports présents plus fédérateurs.


Au-delà des réflexions politiques, le Musée de la Vie quotidienne en RDA reste un espace de découverte et un complément incontournable à toute visite des mémoriaux sur l'Allemagne de l'Est. C'est également une excellente alternative au Musée de la RDA, plus ludique mais moins informatif. En fin de compte, on pourrait regretter que l'exposition paraisse si réduite par rapport à l'ampleur de ses ambitions.


Atouts

  • Entrée libre et audio-guide gratuit

  • Exposition riche en visuel

  • Quartier magnifiquement gentrifié

  • Comprendre l'identité allemande

Limites

  • Récit politique rébarbatif

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