Le parc naturel Südgelände est à la fois un lieu très agréable à visiter et la preuve que les espaces industriels peuvent être renaturalisés. Une relation extraordinaire entre nature et culture s'y établit.
Une visite au parc naturel Südgelände est facultative. C'est aussi un coup de cœur personnel.
En 1988, Berlin-Ouest se dote d’un programme d’aménagement du paysage et de protection des espèces. Ce programme rompt brutalement avec la politique des années 1970 qui favorisait le tout-automobile et faisait des espaces dits libres un usage intensif.
Depuis la Réunification, la reconversion des friches industrielles à l’abandon et le débat sur la question climatique ont amené la capitale allemande à renforcer sa politique environnementale. La règle du zonage pour l’occupation des sols a été réaffirmée. Parallèlement, un projet d’urbanisme prospectif a été mis en place. Autrement dit, la protection de l’environnement et de la biodiversité est devenue une question sociale. La nature peut en effet garantir le bien-vivre ensemble.
Cette idée est celle du développement durable, c'est-à-dire une réflexion sur les interconnexions possibles entre la culture, l’écologie, l’économie et la vie en communauté. Cependant, ces domaines coexistent dans des limitations spatiales, avec un développement distinct pour chacun.
Créer une dynamique nouvelle associant toutes ces thématiques pour parvenir à une symbiose, c’est l’ambition extraordinaire soulevée par le parc naturel du Südgelände. Situé sur l’ancienne gare de triage de Tempelhof, cet espace ferroviaire a été laissé à l’abandon à partir de 1952. Son utilisation était devenue obsolète à cause de la division de la ville. Pendant plusieurs décennies, une flore et une faune se sont développées à l’état sauvage, sans aucun aménagement. Soutenue par des initiatives citoyennes, cette expérience unique a été poursuivie. En 2000, un parc naturel a été inauguré.
Reconversion industrielle, biodiversité et diversité culturelle
Le parc est situé entre deux circuits ferroviaires. À ce titre, l'espace est très bien desservi par les transports en commun. Une fois les droits d’entrée acquittés, le visiteur est soudainement interpellé par la recoloration criarde des anciennes installations de la gare de triage.
En effet, l’art contemporain s’associe au patrimoine industriel. Il le détourne, le transforme et invite par là même à changer notre regard sur les vestiges de l’industrialisation tels que la machine, le métal ou le rail. Le Jardin secret « Giardino Segreto » et ses œuvres métalliques disséminées dans le parc accompagnent le visiteur vers la nature retrouvée sur un circuit de plusieurs kilomètres.
On jettera également un œil au magnifique amphithéâtre. Il est la reproduction en plein air et sans prétention du Théâtre du Globe à Londres, où joue régulièrement dans une ambiance romantique et désuète le Théâtre Shakespeare de Berlin.
Mais très vite, au détour des allées verdoyantes, cette culture quelque peu élitiste est remplacée par celle du graffiti et du tag. De nombreuses fresques des street-artists recouvrent les pylônes des installations ferroviaires.
Au cours de son cheminement, le visiteur croise un immense château d’eau devenu lieu de restauration. À ses côtés, une ancienne locomotive à vapeur est exposée pour le bonheur des enfants. Des ateliers de sidérurgie accueillent désormais divers événements. Plus loin, la découverte d'une énigmatique plaque tournante pour le renversement des locomotives participe à l'aventure.
Cette promenade d’une bonne heure et demie conduit le visiteur à travers une flore préservée. De nombreuses variétés de plantes et de champignons, plus de 350 au total, ainsi que de nombreux insectes (abeilles, araignées, criquets, etc.), et 30 espèces d’oiseaux ont trouvé refuge. Sur les 18 ha que compte le parc, les deux tiers sont recouverts d’arbres et de plantes.
Une renaturation des espaces industriels est possible
Traverser le parc naturel du Südgelände revient à vivre une expérience environnementale hors du commun et porteuse d’espoir. L’ancienne zone ferroviaire et industrielle s’est transformée en une oasis naturelle et une arche de Noé des temps modernes. La nature a progressivement recouvert les installations et les rails sur le sol. Les racines s’enchevêtrent sur les tiges métalliques, trouvant de toute façon le moyen de prospérer.
Il y a 60 ans, les sols étaient entièrement recouverts de ballast ferroviaire. Il faut du temps à la nature pour reprendre ses droits. Avec le temps nécessaire, la renaturation des espaces défrichés est possible. Ce n’est pas un parc comme les autres : il s’agit d’une expérience absolument fascinante qui montre que c’est possible.
L’une des règles essentielles : ne pas toucher une branche ou une feuille au sol. Il ne faut pas entraver le processus de régénération naturelle. Seul le pré est régulièrement entretenu afin de préserver le biotope spécifique. On y amène des moutons sauvages afin qu’ils mangent les jeunes pousses d’arbres.
Ce que nous avons sous les yeux est la vraie nature sans interférence ou maintenance de l’être humain. Ce dernier apprend néanmoins à y vivre et à s’y socialiser grâce à une offre culturelle riche et diversifiée. Le classique et l'alternatif se côtoient. Vivre en ville au contact de la nature pour favoriser le vivre ensemble. Une expérience à découvrir de mai à septembre. Attention cependant : ce n'est pas un musée et l'espace n'ambitionne aucun objectif d'éducation.
Atouts
Une forêt intacte et préservée au cœur de la ville
Parcours pédestre dépaysant et parsemé de curiosités
Excellente photographie
La preuve empirique que la renaturation des espaces industriels est possible
Limites
Une offre culturelle classique pratiquant des prix peu démocratiques
Explications peu exhaustives
Absence de tout interlocuteur sur les lieux
Pour aller plus loin
A Tempelhof, le centre ufaFabrik développe un pôle culturel et écologique ambitieux.
Exposé complet et en français sur le développement durable à Berlin.
L'ancien aéroport de Tempelhof a lui-aussi été reconverti en espaces verts et culturels.
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